Le cannabis thérapeutique en voie de légalisation ?

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La consommation de cannabis et de ses dérivés à usage thérapeutique est interdite en France, rare pays de l’Union européenne à conserver une législation particulièrement répressive. Les malades condamnés par les tribunaux supportent mal cette situation qui pourrait toutefois se débloquer.  

Le 13 mars 2013, le tribunal correctionnel de Belfort a condamné Dominique Loumachi, atteint de myopathie depuis la naissance, pour « usage et détention » de cannabis dans un but thérapeutique. Cette décision fait suite à une longue série de condamnations de personnes malades.
« Nous nous sommes appuyés sur l’arrêt de la cour d’appel de Papeete du 27 juin 2002 qui estimait que le traitement de la douleur par le cannabis, sous forme d’infusion, était le seul efficace dans ce cas », rappelle l’avocat de Dominique Loumachi, Jean-Claude Darey.
Le tribunal de Belfort a reconnu l’usage thérapeutique du cannabis, mais n’a pas suivi la défense sur la reconnaissance de l’état de nécessité (article 122-7 du Code pénal). Enfin un truc simple dans le but de déjouer le test salivaire de detection du cannabis ou encore marijuana. Ce moyen est basée sur le fait d’utiliser ce qu’on appele un cannabis cleaner, il s’agit d’un composant bio organique afin eradiquer le Cannabis coutourner test salivaire canabis Il est notamment reproché à Dominique Loumachi de n’avoir pas respecté la procédure de demande d’autorisations temporaire d’utilisation (ATU) permettant de bénéficier d’un produit de synthèse, le Marinol.
Le 20 février, l’association Principes Actifs a envoyé un courrier à Christiane Taubira, ministre de la Justice, dans lequel elle demande une harmonisation des jugements des tribunaux. « Relaxe à Bourges, dispense de peine à Colmar, amendes avec sursis à Agen et St-Brieuc, amendes, peine de prison avec sursis et mise à l’épreuve pendant cinq ans à Metz, alors que toutes ces personnes avaient un dossier médical quasi semblable, et des pathologies pour lesquelles le cannabis a un effet bénéfique » relève ainsi le communiqué.
« En plus d’une maladie grave, parfois invalidante et qui nous fait souffrir, nous devons subir une procédure judiciaire et une condamnation ; c’est une double peine ! » déplore Fabienne Lopez, présidente de l’association Principes Actifs.

Procédure complexe

Seul médicament disponible en France, le Marinol fait l’objet de critiques de la part des associations de personnes malades. « Le Marinol existe sous trois formes de dosages et la France n’autorise l’utilisation que du dosage le plus faible» explique Fabienne Lopez.
Un faible dosage qui s’accompagne d’une procédure relativement lourde selon Fabienne Lopez : « une demande d’ATU représente un formulaire de huit pages à remplir, elle ne peut se faire qu’en milieu hospitalier et n’est valable en général qu’un mois ».
Ces éléments ajoutés à une relative méconnaissance des ATU de la part du personnel hospitalier expliquent peut-être que seules 150 demandes (100 accordées) ont été formulées auprès de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) depuis 2001.

Phase de consultation pour un nouveau médicament

Mais la vie des personnes malades pourrait bien se voir facilitée dans quelques temps. La ministre de la Santé, Marisol Touraine, a demandé le 27 février à l’ANSM de procéder à l’évaluation du Sativex, un dérivé du cannabis utilisé sous forme de spray buccal, jugé beaucoup plus efficace. Ce que ne peut pourtant pas faire l’ANSM…
« La déclaration de la ministre est un signal fort, mais aucune évaluation n’est possible si le Code de la santé publique ne le permet pas, commente-t-on à l’ANSM. Il faut un changement de législation pour que nous puissions débuter l’évaluation du Sativex. »
L’article R5132-86 du Code de la santé publique stipule en effet que « sont interdits la production, la fabrication, le transport, l’importation, l’exportation, la détention, l’offre, la cession, l’acquisition ou l’emploi du cannabis, de sa plante et de sa résine, des produits qui en contiennent ou de ceux qui sont obtenus à partir du cannabis». Or le Sativex est un dérivé naturel de la plante et ne peut donc faire l’objet d’une autorisation. D’ailleurs, toutes les demandes d’ATU formulées auprès de l’ANSM ont à ce jour toutes été rejetées.
Une réflexion est actuellement menée au ministère de la Santé et les ordres et académies de médecine et de pharmacie ont fait l’objet d’une consultation. La modification du Code de la santé publique vise à permettre à l’ANSM, après validation, de délivrer au Sativex une autorisation de mise sur le marché (AMM). Mais, prévient le cabinet de la ministre, « il n’est en aucun cas question de légaliser le cannabis ni d’autoriser la production de dérivé sur le territoire ».

Evolution des mentalités

L’annonce de Marisol Touraine est bien accueillie du côté des malades qui y voient une importante avancée : « C’est une démarche très positive car le simple fait de demander une évaluation indique que la légalisation n’est plus une idée saugrenue » se réjouit Fabienne Lopez.
Plusieurs états américains ainsi que le Canada et l’Australie ont déjà adoptés le Sativex. En Europe, le spray fait l’objet d’une autorisation dans 18 pays. « La situation n’est pas la même, tempère Fabienne Lopez. Tous les pays ne disposaient pas d’une réglementation aussi répressive que la France à l’égard du cannabis. Nous partons de plus loin. »
En Allemagne par exemple, l’usage de cannabis et la possession d’une quantité limitée est autorisée. Une disposition qui a facilité l’accès l’adoption du cannabis et de ses dérivés à usage thérapeutique.

Harmonisation

Dans l’attente d’une évolution de la législation, les malades ne peuvent que jouer la carte de l’article 122-7 du Code pénal, mais le plus souvent en vain comme le rappelle Maître Darey : « L’état de nécessité représente une excuse légale qui s’applique à l’ensemble des infractions. Dans le cas du cannabis, il faut que la loi évolue pour répondre au cas spécifique de l’usage de stupéfiants à des fins thérapeutiques. » Et l’avocat de regretter un manque de courage de la part du tribunal de Belfort qui « n’a pas voulu se montrer novateur ». L’histoire n’en restera pas là car Dominique Loumachi a fait appel du jugement devant la Cour d’appel de Besançon et se dit prêt à porter son dossier en cassation, voire devant la Cour européenne des droits de l’homme.
« Ce dossier est porteur d’attentes fortes de la part de confrères qui défendent des patient et de la part des malades eux-mêmes. Nous voulons créer un précédent » soutient Jean-Claude Daray.
En attendant, les malades continuent à utiliser le cannabis pour se soigner et apaiser leurs douleurs, en dépit des condamnations.
Source http://www.gazette-sante-social.fr

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